updated 6:51 PM CEST, Jun 27, 2017

Bientôt...

 lemiliedegourdie1

ENCORE UN PEU DE PATIENCE!

LES NEWS SONT EN ROUTE!

ici

La pilule et ses risques

 

 

Une nouvelle controverse surgit autour de la pilule après la plainte déposée contre le groupe pharmaceutique Bayer par une jeune fille de 25 ans, handicapée à 65% qui a utilisé le contraceptif oral de 3e génération Méliane. Quels sont les risques pour les millions de femmes dans le monde qui prennent la pilule ? Explications.

 

A la suite d’une plainte déposée par une jeune française dont le handicap serait lié à la prise d’une pilule dite de 3e génération, la nocivité potentielle de ce contraceptif est à nouveau soulevée.

Marion Larat de Bordeaux a eu un AVC (accident vasculaire cérébral) suite à la prise de la pilule Méliane. Elle a survécu et découvert qu’elle avait un facteur de risque pour les maladies cardio-vasculaires et qu’elle n’aurait jamais dû prendre la pilule et encore moins une pilule de la 3e ou 4e génération, connue pour présenter un risque plus élevé que les pilules de la 2e génération pour ces maladies. Courageusement, elle a rendu son histoire publique et 280 femmes se sont jointes à elle pour déposer une plainte collective.  Aux Etats-Unis 15 000 plaintes ont ainsi  été enregistrées, mais pour le moment les pouvoirs publics ne se laissent pas impressionner.

En Suisse aussi, l’histoire d’une jeune fille a défrayé la chronique. C’était en 2008 : à 16 ans, Céline a fait une embolie pulmonaire en prenant la pilule Yasmine, elle est aujourd’hui handicapée à vie, mais Swissmedic, l’organisme de surveillance des médicaments, n’a cependant pas jugé nécessaire de la faire retirer du marché.

Cette affaire révèle des éléments extrêmement intéressants comme les liens entre les multinationales pharmaceutiques et les médecins ou les dysfonctionnements des organismes de surveillance… Au-delà de toutes considérations morales, les femmes ont le droit de connaître les avantages et les inconvénients des pilules et de tout autre traitement qu’elles pourraient être amenées à prendre. La pilule n’est pas un comprimé anodin, même si elle assure une bonne protection contre la grossesse, elle présente aussi des risques à court et à long terme. Il n’est pas inutile de se pencher sur son histoire.

Herstory

Les premières pilules ont été commercialisées dans les années 50 aux Etats-Unis, sans que l’on ne perde trop de temps à vérifier leur innocuité. La première étude avait été commandée par Margaret Sanger de la Fédération nationale pour le planning familial, dans le but avoué de trouver un contraceptif simple et bon marché, accessible dans les bidonvilles et pour les femmes les plus misérables afin de limiter les naissances dans leurs communautés.

La première pilule a été testée sur 132 femmes portoricaines, trois sont décédées vraisemblablement de thrombo-embolies, il n’y a pas eu d’autopsie pratiquée et on est allé de l’avant. En 1962, plus de 130 cas de thrombose et d’embolie avaient été enregistrés, dont 11 décès, mais le laboratoire SEARLE niait toujours l’existence d’effets secondaires. Lors de la première conférence sur l’innocuité de la pilule à Chicago la même année, l’Association Médicale Américaine conclut qu’il n’y avait pas de preuves d’un rapport de cause à effet entre la pilule et les troubles de la coagulation du sang ; seul un médecin, S. Wessler enseignant à l'Université de Harvard  s’y était opposé.

Les premières pilules étaient alors très fortement dosées en œstrogènes. Petit à petit les chercheurs ont compris qu’on pouvait obtenir le même effet contraceptif avec moins d’hormones et en associant des progestatifs. Cela a permis de diminuer les risques mais n’a pas mis fin complètement aux effets indésirables.

Les troubles de la coagulation, le diabète, le cancer du col de l’utérus et du sein sont des risques connus de la pilule depuis les années 60, mais il est beaucoup plus difficile de trouver des fonds pour étudier les effets secondaires de la pilule que pour prouver son innocuité. En 1975, afin d’y voir plus clair, vingt spécialistes de la Food and Drug Administration (FDA) visitent SEARLE qui avait constamment falsifiés les tests d’innocuité des médicaments en opérant par exemple les tumeurs des animaux malades qui étaient ensuite réintroduits dans l’étude, ou en faisant passer des animaux malades du groupe qui prenaient la pilule dans le groupe témoin qui n’en avait pas reçu. Les conclusions du rapport de 1976 de la FDA sont effrayantes. Malheureusement, ce type de manœuvre n’était pas rare et a notamment été employé pour l’homologation d’autres médicaments comme le Flagyl, l’Aldactone ou d’autres pilules comme l’Ovulène.

Les dosages de la pilule sont beaucoup plus faibles aujourd’hui. Les critères d’homologation sont plus stricts, mais c’est la même histoire qui continue. La liste des contre-indications à la pilule demeure longue et les effets secondaires suffisamment sérieux pour nécessiter une surveillance médicale régulière (troubles de la coagulation, troubles neurologiques et oculaires, maladies hépatiques, hypertension, tumeur et cancer, stérilité, diabète, baisse de la libido, dépression, anomalie fœtale en cas de grossesse). Pourtant la pilule continue à être la méthode conseillée à de nombreuses femmes qu’on n’informe pas de l’existence d’autres moyens de contraception.

L’histoire de la pilule est fascinante, parce que se ne sont pas les femmes des pays appauvris qui s’y sont intéressées lors de sa mise sur le marché, mais bien les femmes des pays riches. Et ce, pour une raison essentielle : la «libération sexuelle» et l'émancipation. La pilule a joué un rôle primordial à ce niveau.

Nouvelles générations de pilule

Les pilules de la 2e génération, ce sont Microgynon et Stédiril, puis est apparue la 3e  génération comme Mercilon, Cilest, Minerva et la 4e génération Jasmine, Yaz…

Il faut toujours donner l’impression d’inventer du neuf pour prendre une part de marché. En diminuant la quantité d’œstrogène, on essaie de diminuer les effets secondaires tels que rétention d’eau et prise de poids. On invente une nouvelle pilule particulièrement indiquée pour l’acné, ce qui nous amène à l’histoire de la Diane.

La Diane a été commercialisée dans les années 80 sous le nom de Diane 50. Elle associe un œstrogène à un nouveau progestatif anti-androgénique, d’où son indication pour l’acné. Ce médicament n’a jamais fait l’objet d’une demande d’homologation en tant que pilule, mais a bien été vendue comme tel. Il se révèle rapidement que son risque d’accidents thrombo-emboliques est plus élevé que celui des autres pilules (de l’ordre de sept fois plus). Dans la pratique du Dispensaire des femmes de l’époque, nous avons connu trois cas d’accidents vasculaires cérébraux dont une qui a perdu l’audition d’un côté. Après la Diane 50 est apparue la Diane 35 (la dose d’œstrogène est diminuée). Malgré les mises en garde, les prescriptions continuent. Et Bayer, son producteur, n’a toujours pas fourni les données requises pour qu'elle soit homologuée comme contraceptif. Pourtant, 99% des femmes prennent la Diane comme contraceptif.

A un certain point on ne peut pas faire mieux que mieux et dans les années 90 on comprend que les pilules de la 3e génération ne sont pas un véritable progrès en raison d’un risque accru de maladies cardio-vasculaires (fois 2.6 par rapport aux pilules de la 2e génération). Celles-ci ne devraient donc pas être prescrites en première intention. Cette directive des agences de surveillance des médicaments ne sera pas suivie, pourquoi ? Les laboratoires pharmaceutiques vont déployer leur arsenal marketing et lobbyiste pour peser de tout leur poids sur la société. C’est là qu’entrent en scène les représentants médicaux et plus tard les leaders d’opinion. Mais également des médecins identifiés par les laboratoires et qui vont diffuser la bonne parole lors de colloques médicaux et congrès d’experts. Leurs liens avec les multinationales pharmaceutiques sont tenus secrets, d’autres ne s’en défendent même pas comme Brigitte Letombe ou Israël Nisand en France. Ce dernier dit même pouvoir garder son autonomie en travaillant avec tous les laboratoires (enquête du Monde du 11.1.2013). La pilule est présentée sous de nouveaux atouts publicitaires avec un effet amaigrissant ou celui de rendre la peau plus belle.

Face aux révélations récentes de la presse sur les risques réels, la ministre française de la santé Marisol Touraine décide le déremboursement des pilules des 3e et 4e générations par la sécurité sociale, mais toujours pas son interdiction.

Même si le risque est faible et de nombreuses femmes sont très contentes de leur pilule, les chiffres sont là :lLe risque de thrombo-embolie est de 2 cas par an pour 10 000 femmes pour les pilules de la 2e génération. On passe à 4 cas par an pour 10 000 cas pour celles de la 3e ou la 4e génération, en comparaison de 0.5 par an pour celles qui ne prennent pas la pilule (et 6 en cas de grossesse). L’association tabac plus pilule augmente considérablement le risque. En effet, dans ma pratique, les deux cas de décès survenus avec la pilule étaient des fumeuses de plus de 30 ans.

Les médecins s’agitent, les plannings familiaux aussi en nous rappelant que la grossesse est aussi un risque et ils s’étendent sur les cancers de l’ovaire évités grâce à la pilule. Malheureusement, avec tout cela on se garde bien de parler des risques augmentés de faire un cancer du sein (ou du col de l’utérus) sur les prises de longue durée et ces cancers sont beaucoup plus fréquents que celui de l’ovaire. Le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) ne fait pas la différence, il classe les oesto-progestatifs de la pilule, comme ceux des hormones de substitution de la ménopause, parmi les substances cancérigènes du groupe 1 (action certaine).

Pour toutes ces raisons, une prescription de pilule nécessite un contrôle médical et une véritable évaluation des risques potentiels. Lors d’une première prescription (pour 3 mois), un contrôle gynécologique complet doit être fait, avec palpation des seins, examen abdominal et vaginal, dépistage du cancer du col de l’utérus (pap), prise de tension. Les antécédents familiaux doivent être connus. Après trois mois, la tolérance de la pilule doit être revue et l’ordonnance éventuellement prolongée. Ces contrôles doivent être répétés tous les ans. Qui prend encore le temps de faire la consultation d’une façon assez approfondie ? Dans les plannings, la pilule peut être remise lors d’un simple entretien, à charge de la femme de faire un contrôle dans les trois mois. Il est aussi important d’éviter une grossesse non désirée. Pire encore, reprendre l’ordonnance d’une copine est franchement à déconseiller.

La pilule restera un bon contraceptif. Dans les centres de santé de femmes (en Suisse) ou chez les naturopathes, on rappellera que la pilule ne doit pas être commencée trop tôt dans la vie, que les douleurs liées aux règles ou l’acné ne sont pas de bonnes indications, tant qu’il y a d’autres solutions et qu’il est préférable de ne pas dépasser 10 ans de prise et l’âge de 30 ans pour une fumeuse, 33 ans pour une non-fumeuse, après tout se négocie. Mais surtout, on discute des alternatives. Chaque contraceptif doit être évalué au niveau de ses avantages et inconvénients et du type de sexualité vécue dans cette partie de la vie. De nombreux gynécologues ne proposent pas volontiers des stérilets (non-hormonaux) et ne mentionnent même pas l’existence des diaphragmes comme méthode barrière, alors qu’ils interviennent moins dans la sexualité au moment des rapports avec préservatifs (par ailleurs le seul contraceptif qui responsabilise les hommes). Quand une femme demande une alternative à la pilule, les gynécologues proposent l’anneau, le patch ou l’injectable, alors que toutes ces méthodes sont hormonales et donc avec les mêmes effets secondaires potentiels.

Allons-nous sortir enfin de l’ère tout pilule (en France : 56% des femmes de 15 à 49 ans et 83% des 20-24 ans) et nous intéresser  à la prévention?

Références :

Pour l’histoire de la pilule : La ménopause, réflexions et alternatives aux hormones de remplacement, R.N. éditions Mamamélis, Genève 1994 et 2006 (3e édition)

Pour la contraception : La sexualité des femmes, racontée aux jeunes et aux moins jeunes, éditions Mamamélis, Genève 2004, 2008 (2e édition)

 

  • Catégorie parente: Rubriques
  • Affichages : 8242

« Je suis entouré de femmes »

 

Le magistrat genevois Pierre Maudet, en charge notamment des questions d’égalité, a commencé par faire le ménage dans son département. l'émiliE revient sur un début fracassant.

 

l’émiliE : Vous avez créé la surprise en venant aux 100 ans de l’émiliE, c’est le début de la campagne ?

Pierre Maudet : En politique, la campagne ne s’arrête jamais. J’estimais avoir ma place à cette journée, dans la mesure où mon département est en charge des questions d’égalité. Cela fait d'ailleurs beaucoup de bien de sortir de la caricature du ministre responsable de l'ordre public que je ne suis pas seulement. Je suis également, comme je le l’ai dit cet après-midi-là, le ministre cantonal en charge des droits et des devoirs, des libertés fondamentales et de leur respect. Mais ma présence constituait-elle vraiment une surprise ?

Oui parce que jusqu’à présent les problématiques de genre ont été plutôt absentes de votre rhétorique. Pourquoi d’ailleurs ?

C'est sans doute parce que l'on ne s'attend pas, notamment dans les milieux féministes, à entendre un élu de droite développer à sa façon un discours sur les enjeux actuels de l'égalité. Or jereprésente le Gouvernement, qui est lui-même attentif à ces problématiques. De la même façon que dans le gouvernement où je siégeais précédemment, celui de la Ville de Genève, où cette question était portée par l'ensemble du collège. Comme par exemple dans le cadre de la réforme du statut du personnel de la Ville, dossier dont j'avais la charge partagée, où nous avons introduit des dispositions directement tirées de la Loi sur l’égalité.

Je cherche donc simplement à assumer la fonction qui est la mienne. Et cela est très lié à la formation politique dont je suis issu, le parti radical, qui a toujours eu à cœur d'affirmer l'importance de valeurs humaines telles que la liberté, l'égalité ou encore la responsabilité. Il est tout à l’honneur de l’Etat que d’incarner un rempart contre les discriminations qui découlent de leur oubli.

Alors justement, votre vision des politiques d’équité, quelle est-elle plus précisément ?

Il est important de poser le contexte et de voir l’évolution au cours du XXe siècle qui a imposé l’égalité sur les questions liées aux droits fondamentaux juridiques et politiques, mais aussi à la sexualité, à la santé et plus largement dans la vie quotidienne des gens, comme en témoignent les impressionnantes archives de l'émiliE. A mes yeux, l’égalité est un combat qui demande à être reformulé et adapté au goût du jour et à l'évolution des mœurs. Il ne peut plus, comme par le passé, se limiter à la protection des femmes, mais il doit comprendre la promotion de celles-ci dans les sphères du pouvoir et activement contribuer à atteindre l’égalité salariale. En parallèle, on doit soigner les équilibres en n'oubliant pas le développement nécessaire de l'accès des hommes à la parentalité.

Mais au-delà de l’égalité, l’équité…

L’égalité est une approche de principe qui pose un cadre fort, l’équité est une approche en situation. En tenant compte du contexte, nous devons essayer de traiter sans discrimination des personnes de genre différent, en y intégrant d'ailleurs la question de l’homosexualité et de l’homophobie. Il s'agit d'utiliser une approche qui, sans nier l’individualité, ne fait pas non plus de discrimination positive. En effet, je reste avant tout attaché à la notion d’égalité républicaine.

Avant votre élection, vous laissiez entendre que le service genevois de promotion de l'égalité entre homme et femme était en sureffectif. Vous pensez que l’égalité est réalisée ?

Non, je pense que l’égalité est une valeur qui, comme un sillon dans la terre, doit être retracé régulièrement et dans lequel il faut semer en continu. Avant d’entrer dans le vif du sujet, je pensais que le féminisme institutionnel que je représente aujourd'hui était une notion un peu dépassée, que le féminisme s’incarnait mieux dans des associations privées. Cette thèse est aussi défendue à gauche, donc je ne m'inscrivais pas dans un clivage gauche-droite consistant à dire que trop de fonctionnaires s’occupent de l’égalité. Je pense différemment aujourd'hui car je me suis interrogé sur la question, notamment à la faveur de ma venue aux 100 ans de l’émiliE, mais aussi en constatant le travail du bureau de l’égalité et les champs à investir au niveau institutionnel. Toute une réflexion sur l’égalité dans le monde politique a été menée cet automne, que j’ai portée devant le Conseil d’Etat en novembre dernier. Il y a encore du chemin à faire et de ce point de vue, le bureau de l’égalité est peut-être plus attendu, en sa qualité d'organe neutre, que les associations ou les partis sur ce type de projet.

Si à l’époque j’ai pu confondre bureau de l’égalité et office des droits humains (et donc ses effectifs), cela m’a interpellé sur la lisibilité des politiques dans le domaine et les différentes entités qui les portent. D’où la volonté de proximité avec le SPPE qui a retrouvé son nom de bureau de l’égalité entre femmes et hommes, qui indique une notion de transversalité, mais aussi de proximité politique.

La série d’éviction de femmes liée à votre arrivée dans ce département, n’est-ce pas donner un mauvais signal aux femmes en général ?

Quelle série d’éviction des femmes ?! J’ai nommé une directrice générale à la tête de l’office pénitentiaire, ce qui ne s’était jamais vu; la cheffe de la police, Monica Bonfanti, est toujours en place. Ce sont, qui plus est, les offices les plus difficiles à gérer au sein du département de la sécurité. Je suis entouré de femmes dans mon secrétariat général, avec une directrice financière, une directrice administrative ou encore une DRH… de quelle éviction parlez-vous?

Dominique Roulin, par exemple…

Dominique Roulin a démissionné dans un contexte difficile et particulier, mais elle n'était pas la première ni la seule directrice d'un établissement de détention. S’agissant maintenant de Madame Bugnon, ça n'est pas une question de relation par rapport à elle, mais par rapport à l’office dans son ensemble, à son positionnement et à sa lisibilité. Madame Bugnon reste toutefois dans le département avec la charge d'une mission précise.

Ce poste de chargée de mission pour une année, n’est-ce pas juste un moyen d’éteindre la polémique ?

D'abord, pour être honnête, je n'ai pas ressenti de polémique sur le sujet et les réactions ont été aussi parcimonieuses que mesurées. Chacun comprend que l’administration bouge, qu'elle évolue. L’autre message consiste à s’interroger sur la pertinence actuelle de ces dispositifs de type bureau, délégué, etc. qui étaient des structures envisagées dans les années 90. Est-ce un alibi, est-ce une forme de déresponsabilisation du milieu associatif et de la population en général ? Il en va de même pour l’intégration, dont le bureau cherche encore sa place malgré la loi en vigueur. Tout cela doit faire l'objet d'une réflexion, et c'est stimulant.

Vous réorganisez les services pour les piloter en direct, c’est ambitieux. Vous allez pouvoir tout faire ?

Il y a sans doute un risque de ne pas pouvoir tout couvrir, mais en favorisant un accès direct à la direction du département aux directeurs et délégués, sans qu'ils doivent passer par des couches hiérarchiques supplémentaires, je leur permets de mieux jouer leur rôle.

Beaucoup s’inquiètent du sort qui va être réservé à Monica Bonfanti. Ces craintes sont-elles fondées ?

Là aussi, vous m'étonnez par cette préoccupation dont je peine à discerner les fondements rationnels.Il y aura en effet toujours besoin d’un ou d’une cheffe de la police! C’est un poste extraordinairement compliqué parce qu’il se situe à l’articulation entre le pouvoir politique, la responsabilité stratégique d’envisager les développements de la criminalité et la responsabilité opérationnelle de la police. Il exige des compétences très particulières qui font que son ou sa titulaire relève du mouton à cinq pattes. Le fait que Madame Bonfanti soit une femme a certes contribué à une meilleure prise en compte d’une série de problématiques, comme par exemple celle des violences domestiques. Cela a sans doute contribué aussi à faire évoluer la profession même de policier et son image. Maintenant, je n'interagis pas différemment avec elle qu'avec un homme directeur général d’office. Comme tout magistrat, toute personne dirigeant une entité administrative passe la main un jour. Ce jour arrivera aussi pour Mme Bonfanti, indépendamment de son genre. Pour moi, ce qui est important, c'est la capacité d'une personne de direction, chargée d'incarner une forme d'autorité, d'assumer ses responsabilités. Dans mon poste précédent, j’ai tout fait pour préparer l’arrivée des femmes dans la Voirie. J’ai aussi été le premier à nommer une femme sapeuse pompière professionnelle et une cheffe de poste de la police municipale aux Pâquis, parce que j'étais convaincu de leur valeur respective, indépendamment de leur sexe.

En direct sur les dossiers, allez-vous intégrer les problématiques homo-lesbo-transphobes jusque-là ignorées par le défunt ODH ?

Oui, pour moi c’est une réelle préoccupation. De la même façon que le sont les droits des handicapé-e-s, qui sont exprimés de manière assez claire à travers la nouvelle Constitution. La mission de Madame Bugnon témoigne de l’intérêt du gouvernement sur ces questions : on part de la nouvelle Constitution pour imaginer une structure souple et efficace, capable non plus seulement de faire de la promotion, ce que font les bureaux ordinaires aujourd’hui, mais de passer dans une ère nouvelle que Zurich connaît depuis 40 ans avec la fonction d'«ombudsperson». L’idée est d’être dans une logique qui va certes nous faire gagner du temps et de l’argent, mais surtout de la satisfaction citoyenne. Sans avoir besoin à tout prix de rationaliser les moyens, mais en les redéployant différemment.

Que pensez-vous de l’appel de Lorella Bertani pour un relèvement de la peine-plancher pour les violeurs ?

Chaque matin, je reçois la main courante de la police et je suis surpris du nombre important de violences domestiques. On sait aussi qu’on parle d’un chiffre noir dans ce domaine. Je pense qu’une réflexion et une discussion sur le Code pénal par rapport à la notion d’auteur et de victime, à un relèvement et à un durcissement des peines, sont tout à fait adéquates. Donc, oui, je suis favorable au relèvement de la peine-plancher pour les auteurs, mais aussi à la reprise intégrale de la définition du viol, trop limitatif aujourd'hui.

Vos résolutions pour les femmes en 2013 ?

Mon premier souci pour 2013 concernera leur participation politique au sens large. Pour les femmes, la capacité à figurer sur des listes est fondamentale. C’est la première démarche qui a été lancée sur la base d’un travail important mené par les groupes de femmes de tous les partis, présentée au Conseil d’Etat par mes soins et qui fait maintenant l’objet d’une diffusion auprès des cercles politiques. C’est important car cela tombe précisément au moment où les partis sont en train de constituer leurs listes.

Toujours en lien avec le champ politique, les atteintes faites aux élues représente pour moi un enjeu majeur. Je pense aux remarques sexistes – et le mot est encore faible – que l'on entend aujourd'hui, à la misogynie ambiante, inadmissible au XXIe siècle, qui constituent aussi une atteinte à l’autorité. A cet égard, je ne suis pas très optimiste sur la campagne qui s’annonce...

Mon second chantier englobe la thématique des violences au sens large et en particulier celles faites aux plus vulnérables (personnes âgées, enfants, femmes), pas seulement dans le cadre domestique mais je pense aussi à la violence de rue. A ce niveau, le travail doit être renforcé. Nous allons également améliorer les actions de prévention et de prise en charge des situations de mariages forcés, de lutte contre la prostitution illégale et la traite des êtres humains, en lien avec la Confédération.

Le troisième aspect concerne le domaine du travail. Je suis très attaché à l’idée du partenariat social avec un Etat arbitre et superviseur, mais qui soit aussi à même de soutenir et de conseiller les organisations souhaitant aller de l'avant sur ces questions. Nous devons encore approfondir ce volet pour qu'il impacte concrètement les questions d'égalité salariale.

 

  • Catégorie parente: Rubriques
  • Affichages : 6515

L’échappée, belle perspective

 

 

Une nouvelle association vient de voir le jour à Genève, avec pour but de soutenir notamment des chantiers de femmes. Cette initiative inédite a déjà reçu l’appui de femmes politiques romandes.

A première vue, on pourrait croire à l’une de ces utopies nostalgiques des mouvements hippies. Mais à y regarder de plus près, l’idée s’inspire directement de l’organisation néerlandaise Mama Cash, plus vieille institution de collecte de fonds au monde, destinée à soutenir les projets de femmes partout sur la planète. L’échappée, association créée à Genève par un groupe de féministes européennes, a des ambitions à peine plus modestes et affiche à travers le discours de ses porte-paroles, Aude Marcia et Elisa Teton, une détermination sans faille. Selon elles, «L’échappée a une vocation internationale justement parce que l’articulation entre les alternatives et les luttes sur plusieurs territoires est indispensable». Et la posture anti-mondialisation qui va d’ordinaire avec ce type de démarche ? Elles sourient du raccourci et précisent «qu'il est important de développer chaque chose localement, en portant attention au contexte, aux besoins, aux histoires spécifiques mais que cela n'empêche en aucun cas de nous relier largement et de nous nourrir des expériences des unes et des autres. Et si nous trouvons des alliées dans nos démarches, nous n'avons absolument pas envie de nous embarrasser de frontières». Avec des bases en Belgique, en France, en Suisse, en Allemagne et en Espagne, leur association, «de terrain», précisent-elles, accompagne les projets là où ils émergent.

Féministes convaincues, elles mettent la théorie en pratique : elles veulent surtout «sortir des schémas de victimisation» et «donner aux femmes une possibilité d’agir et de reprendre du pouvoir sur leurs vies». Cette logique d’empowerment s’articule autour de trois axes : la formation et la réappropriation de savoir-faire (chantiers-écoles…), l’information (radios associatives, revues alternatives, outils de parole collective…) et la transformation sociale (collectif contre le logement précaire, collectif pour la réappropriation des contraceptions…).

Ce foisonnement ouvre bien des perspectives. En matière d’apprentissage et d’insertion par exemple, cela permet à des femmes n’ayant pas accès à la formation, faute de moyens, de découvrir un métier et d’en acquérir les bases. En soutenant des chantiers-écoles non-mixtes, L’échappée ouvre aux femmes des domaines traditionnellement réservés aux hommes. L'idée est de dépasser ses appréhensions et ses réflexes d'auto-censure afin de se sentir parfaitement légitimes dans les métiers du bâtiment ou les travaux forestiers. A l’issue de ces sessions de formation, elles auront développé des compétences dans différentes branches de l’artisanat, se seront familiarisées avec les machines, auront participé activement aux processus de conception et de décision et auront rencontré des professionnelles qualifiées. Aude Marcia, elle-même plombière-chauffagiste, souligne l’importance de cette transmission des savoir-faire dans un contexte protégé des rapports sociaux de sexe.

Parmi les soutiens à L’échappée, on compte les conseillères nationales Anne-Catherine Menetrey et Maria Roth-Bernasconi, qui estime que «c'est une initiative originale, à la fois très concrète – je pense aux chantiers de femmes, aux formations pratiques –, ancrée sur le terrain, et intellectuelle, axée sur l'information». Selon elle, «cette convergence de savoirs, de savoir-faire et de savoir-être est porteuse d'un grand potentiel de transformation sociale. Le fait que des jeunes femmes partagent et cherchent à réaliser une autre vision de la société me donne espoir en l'avenir». D’ailleurs la parlementaire genevoise qualifie, fort à propos, L’échappée d’association «à but constructif».

Le plus dur pour les membres de l’association, c’est bien sûr de trouver les fonds nécessaires à la mise en œuvre dans les meilleures conditions de ces chantiers-écoles. Avec la crise, les États européens ont tendance à réduire les subventions allouées à ce genre de projets. Du coup, le financement privé prend la relève, dans la mesure du possible. Rien ne semble démonter les jeunes organisatrices qui sillonnent l’Europe dans ce but.  Nous exposons notre démarche à des fondations, lors de soirées publiques et aussi chez des particuliers conscientisés qui souhaitent nous soutenir en invitant leurs connaissances pour récolter des dons. Ça peut ressembler à des réunions Tupperware, mais c’est une pratique de collecte courante, qui permet de se rencontrer réellement et d'établir des liens de confiance», explique Aude Marcia. Le chantier de l’été 2013 se déroulera dans l’Isère et L’échappée cherche encore 70’000 francs afin de pouvoir boucler son budget d’un total de 216’000 francs.

Plus d’infos : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

L'échappée,  c/o Lestime 5, rue de l'Industrie 1201 Genève

 

  • Catégorie parente: Rubriques
  • Affichages : 6728

Notice: Undefined offset: 1 in /home/clients/0e76f9398496447e4964931f675ef9d4/web/templates/gk_news2/html/pagination.php on line 18

Notice: Undefined offset: 1 in /home/clients/0e76f9398496447e4964931f675ef9d4/web/templates/gk_news2/html/pagination.php on line 34

Notice: Undefined offset: 2 in /home/clients/0e76f9398496447e4964931f675ef9d4/web/templates/gk_news2/html/pagination.php on line 34

Notice: Undefined offset: 3 in /home/clients/0e76f9398496447e4964931f675ef9d4/web/templates/gk_news2/html/pagination.php on line 34